Portrait

Matthias Meilland, et si les garçons naissaient dans les roses

Horticulteur

Sur l’arbre généalogique de la dynastie des célèbres rosiéristes, Matthias figure à la 6e génération…
Il est le petit-fils de Francis qui, en 1948, quitte Lyon et la production horticole pour créer un centre de recherche sur la création de la fleur coupée sur les terres familiales au coeur du Cap d’Antibes. C’est là que Matthias voit le jour en 1977 sans avoir connu son célèbre grand-père. Une légende familiale, un mythe du monde de l’horticulture, dont il connaît par coeur l’histoire exceptionnelle. Celle d’un inventeur de génie qui porta au sommet de la gloire ses célèbres créations et sublima le genre Rosa à travers le monde.

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L’histoire d’un fils de marin-pêcheur d’origine italienne, devenu champion, puis moniteur de ski nautique grâce à une passion inoxydable pour la Méditerranée dont il a fait son bureau…
Le ski nautique est né dans la baie de Juan-les-Pins dans les années 30 sur une idée du norvégien, Émile Petersen et de Léo Roman. En pleine émergence du motonautisme, et par jeu sans doute, ils ont eu l’idée un peu folle de transposer le ski de neige sur l’eau... Et comme ils étaient tous les deux des sportifs accomplis, au bout de quelques essais, ils sont parvenus à glisser sur l’eau... Le vrai engouement pour ce sport est apparu après la guerre en 1949, sur une Côte d’Azur peuplée par un tourisme d’élite. C’est à cette époque que Léo Roman relance le ski nautique à Juan-les-Pins. Parler de “Monsieur Roman” avec Marco c’est un peu comme évoquer la figure du père. C’est celui qui a su donner la chance de sa vie à un garçonnet de 9 ans qui, chaque jour, depuis la plage assistait aux cours de ski nautique prodigués par le maître...
“C’était un grand sportif. Il avait été boxeur, maître-nageur, danseur mondain. C’était un homme très charismatique. C’est lui qui a inventé le ski nautique et fait connaître le nom de Juan-les-Pins dans le monde entier. Il était entouré d’une équipe, dont mon père Marc, qui pilotait les bateaux de ski nautique en été et pêchait en hiver...” se souvient Marco avec émotion.

«  Une de ses premières créations est la “Golden Gate”, rose emblématique de l’exposition universelle de San Francisco en 1936. Vient ensuite “Madame Meilland” baptisée “Peace” dans le reste de la planète. Elle a orné les tables de négociations des travaux préparatoires à la création de l’ONU en 1946 à San Francisco. En 1956, Monaco fait appel à mon grand-père pour créer une rose qui symbolisera le mariage princier. De là, naîtra la splendide “Grace de Monaco”  » raconte Matthias…
Depuis Meilland invente les roses de la famille Grimaldi, la dernière en date “Princesse Charlène” a été découverte en 2014.

Des pratiques inscrites dans les gènes
En 1958, Francis décède et son fils Alain, le père de Matthias, se retrouve à 18 ans propulsé à la présidence de la société familiale.
“Mes premiers souvenirs avec les roses remontent à l’âge de 5, 6 ans - se souvient Matthias. En sortant de l’école du Cap, mes parents me déposaient chez ma grand-mère Manou avant de retourner travailler au centre de recherche. Là, on installait une table et je commençais à faire du pollen et à fabriquer des bébés roses…”
Pour Matthias, c’est moins un jeu d’enfant qu’une pratique inscrite dans ses gènes. Quand sa grand-mère décède, il a dix ans et se met à s’intéresser au monde de l’image et du cinéma. “En réalité, je ne me suis jamais vraiment détourné de la rose. J’ai continué à faire beaucoup de voyages avec mon père en Amérique du Sud et au Mexique, les grandes zones de développement de la floriculture à l’époque. Et c’est en regardant faire que j’ai appris sur le tas… J’aurais pu comme ma soeur Sonia me lancer dans des études d’agronomie mais après 3 ans aux États-Unis, je suis rentré sur la Côte où j’ai fait une école de cinéma avant de diriger pendant dix ans une entreprise de films institutionnels. À force de vivre ici, au milieu des champs de roses, les racines ont été plus fortes et j’ai repris naturellement les hybridations sous l’oeil amusé de mon père...”
De fil en aiguille, Matthias prend en charge les relations publiques de l’entreprise et le développement sur la Chine. “C’est un marché immense que l’on a pénétré en prenant notre temps et en privilégiant les relations avec des personnes qui sont avant tout de grands amateurs de roses. Aujourd’hui, on continue le développement en fleurissant les villes et les villages de Chine...”

"Mademoiselle Meilland", bel hommage aux femmes de la saga
De cette fantastique saga familiale, Matthias a hérité un goût extraordinaire du voyage.
“Je crois qu’il nous a été transmis par la mère de mon grand-père. Issue de la branche lyonnaise, c’est à travers ses lectures qu’elle s’imaginait le monde… C’est elle qui a poussé Francis à partir. À 23 ans, avec les quelques mots d’anglais qu’il connaissait, il a traversé les États-Unis. Mon père a aussi hérité de ce besoin de découverte. C’est lui qui a ouvert les marchés de l’Amérique du Sud, du Japon, de l’Australie… Son idée c’était d’aller voir ailleurs ce dont ces pays avaient besoin, et de leur apporter notre savoir-faire”.
Pourtant… c’est en hommage à toutes les femmes de la famille qu’une rose sera portée sur les fonts baptismaux à l’occasion des Floralies d’Antibes (voir programme). “Madame Meilland a été vue pour la première fois en 1936. Pour son anniversaire, on a décidé de créer “Mademoiselle Meilland”, une rose bonbon très parfumée, très résistante et très belle qui symbolise toutes les femmes de la famille qui ont oeuvré depuis 140 ans à la création des roses Meilland”.
“Toutes générations confondues, elles ont travaillé dans la discrétion pour la transmission de notre patrimoine familial et de notre savoir-faire à travers le monde. Je crois qu’une rose est le plus bel hommage qu’on pouvait leur rendre…” confie Matthias non sans émotion...